La Science pour la Paix

Partager le Savoir 6 s’est tenu à Malte du 5 au 8 mai grâce à l’invitation du “Malta Council for Science and Technology”. Le Premier Ministre de Malte nous a fait le grand honneur de prendre la parole devant notre assemblée. En lui souhaitant la bienvenue et pour résumer notre propos, j’ai invoqué la “Science pour la Paix”, idée qui fut à l’origine de la création du CERN il y a un demi-siècle et qui demeure aujourd’hui d’une brûlante actualité, dans un monde dominé par la menace d’une fracture Nord-Sud. Le Premier Ministre– dont le talent politique nous fit une forte impression– s’empara aussitôt de cette devise, soulignant combien elle s’appliquait à Malte, à son action en relation avec le développement et au contexte de la Méditerranée et de l’Afrique.

En fait, c’est bien cette idée qui donna le ton de l’ensemble de cette conférence. De provenances diverses (Europe, Maghreb, Egypte, Israël, Jordanie, Palestine, Afrique du Sud, de l’Est et de l’Ouest), spécialistes de l’eau, de l’énergie, de l’alimentation de l’Internet ou de la science fondamentale, physiciens, économistes, industriels ou fonctionnaires, ont débattu, avec passion durant de longues journées et soirées. C’est ainsi (nous le savons d’expérience) que naissent les projets, et parfois les succès! Les temps forts de la Conférence résultent aussi bien des évolutions depuis notre précédente session que de la crise actuelle dans le monde arabe. Philip England (Oxford) a répondu aux interrogations que suscitent le tremblement de terre et le tsunami au Japon. L’accident nucléaire de Fukushima qui en est résulté change t-il notre perspective sur la “renaissance nucléaire”?

Les ressources nouvelles de gaz naturel vontelles modifier le paysage énergétique mondial? Jacques Bouchard et Bruno Weymuller ont donné leur éclairage à ces questions, Catherine Cesarsky a exposé les bases de la politique française de l’énergie tandis qu’une Table Ronde a discuté les programmes d’énergies renouvelables dans la zone MOAN. Un accent important a été mis sur les solutions novatrices pour les pays en état de stress hydrique (de Malte au Moyen-Orient), y compris leurs implications sociales. L’Internet pour l’Afrique revêt un double aspect: la Grille de Calcul permet à un chercheur basé à Marrakech ou à Johannesburg d’avoir accès “en direct” aux expériences du CERN, alors que les nouveaux câbles sous-marins de fibre optique rendront le haut-débit enfin abordable pour le public. L’Internet Mobile est sans nul doute promis à un grand avenir en Afrique et a joué un rôle majeur dans la diffusion des révolutions dans les pays arabes.

Les Centres internationaux que sont le CERN, l’ICTP à Trieste, SESAME en construction en Jordanie et le IASS à Potsdam sont la clé pour permettre  l’intégration des pays moins développés dans la science mondiale. Dans ce même but, les réseaux Internet Nationaux d’Education et de Recherche doivent se regrouper afin d’atteindre une taille critique et nous sommes fiers d’avoir pu accueillir les dirigeants des alliances UbuntuNet, WACREN et ASREN regroupant l’ensemble du continent africain.

La sécurité alimentaire est une très grande priorité, particulièrement en Afrique et nous avons pu réunir un panel d’experts originaires du Bénin, du Kenya, du Maroc, d’Egypte et d’Israël.

Le succès du développement est lié à de robustes taux de croissance et c’est un des facteurs qui déterminera le succès ou non des révolutions arabes. Henry Marty-Gauquié, Moncef Cheikh-Rouhou et Pascal Colombani ont montré comment les pays en voie de développement peuvent devenir compétitifs. Lionel Zinsou a attiré l’attention sur un changement radical de la situation des finances de l’Afrique qui permettra au continent de financer son développement dans les prochaines décennies. Nos conférences se présentaient à l’origine comme un dialogue sur le développement entre membres des élites scientifiques. Une  nouvelle dimension a surgi avec ces milliers de personnes dans les rues, exigeant une vie meilleure et la fin de l’oppression par des gouvernements tyranniques. Nous ne prenons pas de positions politiques, car cela dépasse nos compétences, mais il va de soi que nous souhaitons aux peuples arabes le plus grand succès  dans la satisfaction de leurs aspirations. Le progrès économique exige le long terme et nous pensons que notre meilleure contribution est de poursuivre notre action visant à la construction dans ces pays d’une société civile éprise de progrès. Nous espérons que cette conférence sera une étape dans cette direction.

Robert Klapisch, Président de la Fondation

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