EU STRATEGY FOR PARTICLE PHYSICS AND THE ART OF A GLOBAL VIEW WITHOUT THE AFRICAN CONTINENT

EU STRATEGY FOR PARTICLE PHYSICS AND THE ART OF A GLOBAL VIEW WITHOUT THE AFRICAN CONTINENT

Avis de deux physiciens participant au symposium de la stratégie européenne à Grenade, du 13 au 16 mai 2019.

La communauté scientifique de physique des particules s’est réunie lors d’un symposium de quatre jours pour examiner et discuter des contributions à la vision stratégique européenne pour la recherche et le développement dans ce domaine. Bien qu’initié par la communauté européenne de physique des particules et le CERN comme acteur principal, le colloque a vu la participation régionale de l’Amérique du Nord et de l’Asie avec des instituts de recherche bien établis et avancés en physique des particules. Il s’agissait donc d’un colloque international de plus de six cents scientifiques afin de définir les priorités stratégiques du domaine pour plusieurs années ou décennies à venir.

Compte tenu du succès de la recherche en physique des particules, qui a culminé avec la découverte du boson de Higgs en 2012, et des recherches approfondies de la « nouvelle physique » qui n’ont jusqu’à présent pas été marquées par une grande évolution du domaine, les priorités stratégiques au-delà du LHC Run2 sont étoffées en tenant compte des ressources internationales en capitaux humains, logistiques et financiers.

Compte tenu de la rareté des ressources, il est plus important que la communauté mondiale de la physique des particules et des agences de financement se réunisse et définisse une stratégie concertée. En effet, l’Europe, ainsi que les principales autres régions du monde, pourraient définir leurs stratégies pour la physique des particules avec les apports de la communauté internationale. L’évolution du domaine et son orientation pourraient peut-être découler d’une définition audacieuse d’une stratégie, sans présumer des atmosphères politiques ni s’attendre à ce que les autres régions suivent. Pour parvenir à la définition d’une stratégie, de nombreuses contributions de la communauté internationale ont été recueillies sous forme de propositions, puis discutées et débattues lors de sessions plénières et de sessions parallèles thématiques. Il s’agissait d’un véritable esprit de coopération internationale qui constitue le dénominateur commun de la culture actuelle des activités scientifiques.

La physique des particules s’appuie sur des efforts mondiaux, avec une présence modeste mais en constante augmentation des pays en développement d’Asie, d’Amérique du Sud et d’Afrique. Si nous pouvons être fiers que des pays africains comme le Maroc, l’Égypte et l’Afrique du Sud aient pris pied dans de grands projets internationaux au LHC, la coopération entre les pays africains et entre ceux-ci et le reste du monde n’est pas très développée. C’est particulièrement vrai pour l’Afrique subsaharienne, qui est l’une des régions du monde qui se développe le plus rapidement et dont les besoins en matière d’éducation sont importants. En effet, d’après les représentations institutionnelles lors du symposium, il était évident, une fois de plus, que dans de nombreux domaines de la recherche en physique fondamentale et appliquée, l’Afrique était absente. Afin d’étendre – ou d’augmenter – les liens scientifiques internationaux existants avec ce continent, dans le cadre du développement de la vision stratégique européenne pour la physique des particules, l’engagement européen dans l’éducation, la communication et la sensibilisation à la physique, en direction des pays en développement, devrait être renforcé et soutenu également dans des programmes ciblés vers l’Afrique. Le succès de ces programmes ciblés serait suffisamment encourageant pour motiver une révision des objectifs et une réflexion sur les mécanismes de durabilité. L’objectif central à long terme – à intégrer dans le développement de la stratégie – serait d’aider à améliorer l’enseignement supérieur en Afrique au-delà des frontières nationales et, ce faisant, de contribuer de manière significative au développement de la science et de la technologie sur ce continent. Nous pensons que le maintien du leadership de l’organisation de programmes d’éducation ciblés en Afrique, en partenariat avec d’autres instituts intéressés et avec les gouvernements et les décideurs africains, présente une occasion unique pour l’Europe d’être le pionnier du développement scientifique et technologique d’une région de plus d’un milliard d’habitants dont les besoins non satisfaits sont importants mais le potentiel humain immense.

L’Afrique, continent riche en ressources naturelles, est toujours en retard en matière d’innovation, de transfert de connaissances et d’éducation de masse, et ses économies ne connaissent pas la croissance attendue pour répondre aux besoins de ses populations en rapide augmentation. La jeunesse africaine, qui représente plus de 70 % de la population, est très souvent non qualifiée, inemployable, retombe dans la pauvreté et a du mal à s’en sortir. L’Afrique est en outre confrontée au problème de la rétention de ses jeunes qualifiés.

Cependant, les initiatives africaines promues par les pays africains avec leurs propres ressources – parfois en partenariat avec des instituts internationaux – sont nombreuses. Parmi elles, dans notre domaine, nous citons, pour n’en citer que quelques-unes, l’East Africa Institute for Fundamental Research (EAIFR), le réseau égyptien de physique des hautes énergies, le RUPHE au Maroc, l’excellente infrastructure de l’expérience HESS en Namibie, sans oublier les prestigieuses universités d’Afrique du Sud et ses laboratoires de recherche de haut niveau.

Pour aider à résoudre efficacement les problèmes susmentionnés, nous pensons que les instituts d’enseignement et de recherche africains devraient participer aux discussions et à la planification stratégique de domaines majeurs tels que la physique des particules. Nous pensons que la participation africaine à ces discours présente des avantages majeurs. Cela permettrait aux partenaires internationaux qui s’intéressent au développement et à la rétention des capacités en Afrique d’intégrer les contributions des Africains eux-mêmes, plutôt que de s’en tenir à leurs propres opinions sur la manière dont ils pourraient « aider » ce continent. En outre, l’aide – quelle que soit la forme sous laquelle elle est fournie – aura plus d’impact. À cet égard, nous déplorons le manque de participation africaine aux stratégies européennes de physique des particules et aux symposiums qui y sont associés.

Nous espérons que les prochaines fois, nous nous réunirons pour définir ou revoir les stratégies – européennes, américaines, japonaises ou chinoises – nous encouragerons les efforts constructifs visant à attirer la présence et la participation des pays en développement et leurs apports afin d’améliorer les partenariats de recherche et d’éducation qui sont bénéfiques à toutes les parties.

Dr Kétévi Assamagan (Ketevi.Adikle.Assamagan@cern.ch),États-Unis/Bénin/Togo, physicien @Brookhaven National Laboratory, membre de l’ASP, membre du comité d’organisation de l’École africaine de physique et d’applications.  

Dr Fairouz Malek (Fairouz.Malek@cern.ch), franco-algérien, physicien @Laboratoire de Physique Subatomique et de Cosmologie de Grenoble, France, membre de l’EPS.  

L’article en PdfPP_strategy_Africa

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